8 avr. 2008

PESTICIDES














Pesticides organochllorrés et santé publique aux ANTILLES
B A S A G
Bulletin d’Alertes et de Surveillance Antilles Guyane.





Organochlorés et milieux

Les eaux de surface
Suite aux contrôles effectués par les Directions régionales
de l’environnement (DIREN) et les Directions de la santé
et du développement social (DSDS), il apparaît que la
quasi-totalité des rivières à l’aval des bassins versants
est contaminée par le chlordécone (teneurs comprises
entre 0,2 et 1 μg/l) sans qu’une évolution ne se dégage
au cours du temps (sur la période 1999 - 2004) ;
cela traduit la très grande rémanence dans le sol de ce
composé et son affinité pour certaines argiles.
Les eaux de distribution
Des campagnes de mesure dans les eaux de consommation
ont mis en évidence en 1999 une contamination par
les organochlorés de certains captages d'eaux alimentant
la population, aussi bien en Martinique qu'en Guadeloupe.
En Martinique, un captage a été définitivement
fermé (les concentrations dépassaient 3 μg/l de β-HCH).
En Guadeloupe, suite à une étude réalisée par la Cire
pour adapter les décisions aux niveaux de contamination
[4, 5], deux captages ont été définitivement fermés ;
trois captages ont fait l'objet de fermeture temporaire
avant d'être équipés de filtres à charbon actif ; deux
captages ont fait l'objet de limitation d'usage temporaire
(des valeurs atteignant 10 μg/L pour le chlordécone,
2 μg/L pour le β-HCH et 0,3 μg/L pour la dieldrine
ont été observées en Basse-Terre, les valeurs limites
réglementaires étant de 0,1 μg/L pour le chlordécone
et de 0,03 μg/L pour la dieldrine). Aujourd'hui,
grâce aux équipements mis en place (filtres à charbon
et/ou ultrafiltration) ou aux dilutions opérées avant distribution,
la situation dans le domaine de l'eau potable
est globalement maîtrisée et l'eau délivrée aux consommateurs
respecte les normes (ainsi, par exemple en Martinique,
99% de l’eau distribuée en Martinique est indemne
de chlordécone).

Organochlorés ett alimentation

Au niveau des denrées, une première étude de la DSDS
de Martinique réalisée en 2001 [6] a montré qu’une
contamination des sols par le chlordécone et le βHCH
pouvait atteindre les légumes racines cultivés (chou de
chine, chou caraïbe, patate douce). Une seconde étude a
montré que les ressources halieutiques étaient également
contaminées par le chlordécone [7]. Depuis 2001, les services
chargés des contrôles de qualité des aliments
(Direction régionale de la concurrence, de la consommation
et de la répression des fraudes—DRRCCRF, Service
de protection des végétaux—SPV, Direction des services
vétérinaires-DSV) ont exploré diverses denrées végétales
et animales tant en Martinique qu'en Guadeloupe. En
Martinique, une synthèse a été réalisée par la Cire en
octobre 2004 [8].
Les végétaux
Des contaminations de choux de chine, de patates douces,
de choux caraïbe, d'ignames, de carottes, de manioc, de
malanga ont été observées ; la patate douce et le dachine
apparaissant comme les plus fréquemment contaminés.
Ces résultats ont été confirmés par les analyses réalisées
suite aux arrêtés préfectoraux de 2003. Par contre,
les analyses réalisées sur des légumes ou des fruits aériens
(tomate, banane, concombre, agrumes,…) n’ont pas
conduit à la détection de chlordécone. Du fait du caractère
non systémique de la molécule, il est aujourd’hui admis,
sous réserve de vérifications complémentaires, que
seules les productions végétales en contact avec le sol sont
exposées à un risque de contamination.

La chaîne animale

Des contaminations ont été observées chez des bovins (et
dans le lait), des ovins, des porcins, des poissons de rivières,
des poissons littoraux, des crustacées d'eau douce et
de mer. Concernant les animaux aquatiques, les teneurs
les plus élevées sont enregistrées dans les poissons de rivière,
les crustacées et les poissons d’élevage.


Principe de précaution

Dans le domaine des pesticides comme dans de nombreuses
autres problématiques environnementales, l’étude
des liens entre l’exposition à ces agents et la santé
se situe dans un champ de grandes complexité et incertitude.
Cependant, à l’heure où la santé et l’environnement
font l’objet d’une attention sociale croissante,
l’existence de ces obstacles ne saurait empêcher la prise
en compte des risques sanitaires induits par les modifications
que l’homme fait subir à son environnement. Le
principe de précaution est là pour rappeler que les incertitudes
scientifiques ne justifient pas l’inaction.
C’est ce principe qui sous tend la gestion actuelle de ce
problème aux Antilles : le chlordécone étant interdit d’utilisation,
aucune trace résiduelle n’est tolérable dans les
aliments. A cet égard, des arrêtés préfectoraux ont été
adoptés d’abord en Martinique (n° 03-0725 du 20
mars 2003), puis en Guadeloupe (n° 2003-1496 du 20
octobre 2003). Ils complètent l’interdiction de commercialisation
de toute production alimentaire dès lors que
des traces de chlordécone ont été mises en évidence
dans les produits, par la mise en place d’une procédure
visant à contrôler la contamination des sols avant mise
en culture. En effet, si aux Antilles, l’essentiel des apports
en organochlorés est le fait du passé, la rémanence
de ces produits dans l‘environnement (notamment
les sols et les cours d’eau – par drainage) pose problème
du fait de la contamination et de la biomagnification
(bioamplification) à travers la chaîne alimentaire
ainsi que de la bioaccumulation de ces substances dans
les graisses animales.
Si le principe de précaution a été retenu pour la gestion
du risque et la protection du consommateur , celui-ci se
doit (par essence) être proportionné et révisable. Cette
proportionnalité doit être adaptée d’une part, au niveau
des connaissances scientifiques disponibles et d’autre
part, au niveau d’exposition au risque ; sa traduction
opérationnelle étant la définition de teneurs maximales
tolérables (Limites Maximales de contaminants) dans les
aliments consommés aux Antilles.
Parallèlement, des études doivent être menées et soutenues
afin de réduire les incertitudes relatives à cette exposition
résiduelle et les risques qui y sont associés. Les
résultats de ces études doivent, le cas échéant, conduire à
revoir régulièrement le niveau de proportionnalité du
principe de précaution en prenant en compte l’avancée
des connaissances.
C’est dans ce cadre qu’une double démarche est actuellement
menée aux Antilles : 1) une évaluation quantitative
des risques sanitaires, 2) un programme de recherche
épidémiologique.

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